Garanties professionnelles
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Connaître les acteurs et les institutions
Le code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit plusieurs garanties pour les élus qui cumulent l’exercice de leur mandat avec une activité professionnelle. Ces garanties sont destinées à protéger les élus locaux de mesures discriminatoires et à leur garantir de disposer du temps nécessaire à l’exercice de leur mandat.
Garanties pour l’élu qui souhaite suspendre son activité professionnelle
Compte tenu des responsabilités propres à certaines fonctions locales, le législateur a introduit dans le CGCT des dispositifs pour permettre à certains élus locaux de suspendre leur activité professionnelle.
Le droit à la suspension du contrat de travail
Les maires, adjoints au maire, présidents et vice-présidents ayant délégation des conseils régionaux et départementaux qui ont cessé d’exercer leur activité professionnelle pour leur mandat bénéficient, s’ils sont salariés, de certaines garanties reconnues par le code du travail aux membres de l’Assemblée nationale ou du Sénat (art. L. 2123-9, L. 3123-7 et L. 4135-7 du CGCT). Ces garanties bénéficient également aux élus agents publics (art. L. 3142-87 du code du travail).
Les garanties visées sont celles prévues aux articles L. 3142-83 à L. 3142-87 du code du travail. Elles recouvrent :
- le droit à la suspension du contrat de travail : les salariés concernés peuvent demander la suspension de leur contrat de travail jusqu’à l’expiration de leur mandat, s’ils justifient d’une ancienneté minimale d'une année chez l'employeur à la date de leur entrée en fonction ;
- le droit à réintégration : à l'expiration de leur mandat, les salariés concernés retrouvent leur précédent emploi, ou un emploi analogue assorti d'une rémunération équivalente, dans les deux mois suivant la date à laquelle ils ont avisé leur employeur de leur intention de reprendre cet emploi. Ils bénéficient de tous les avantages acquis par les salariés de leur catégorie durant l'exercice de leur mandat, ainsi que d’une réadaptation professionnelle en cas de changement de techniques ou de méthodes de travail.
Le droit au détachement ou à la mise en disponibilité pour les élus fonctionnaires
Les élus fonctionnaires peuvent bénéficier, pour l’exercice de leur mandat et à leur demande, d’une mise en disponibilité de plein droit pour l’ensemble des mandats électifs.
Les maires, adjoints au maire, présidents et vice-présidents ayant délégation des conseils régionaux et départementaux peuvent bénéficier d’un détachement de plein droit (art. L. 2123-10, L. 3123-8 et L. 4135-8 du CGCT).
Principe de non-discrimination
La loi proscrit toute discrimination à l’égard des salariés en raison de l’exercice d’un mandat électif (art. L. 1132-1 du code du travail).
Le CGCT offre également aux élus locaux des garanties leur permettant de ne pas être pénalisés dans le cadre de leur activité professionnelle :
- aucune modification de la durée et des horaires de travail prévus par le contrat de travail ne peut être effectuée en raison de l’utilisation des temps d’absence prévus par le CGCT sans l’accord de l’élu concerné (art. L. 2123-7, L. 3123-5 et L. 4135-5 du CGCT) ;
- aucun licenciement ni déclassement professionnel, aucune sanction disciplinaire ne peuvent être prononcés en raison de l’utilisation des temps d’absence prévus par le CGCT sous peine de nullité et de dommages et intérêts au profit de l’élu. La réintégration ou le reclassement dans l’emploi est de droit (art. L. 2123-8, L. 3123-6 et L. 4135-6 du CGCT) ;
- il est interdit à tout employeur de prendre en considération l’exercice d’un mandat local pour arrêter ses décisions en ce qui concerne l’embauche ou le renouvellement de contrat, l’affectation, la mutation, la formation professionnelle, l’avancement, la rémunération et l’octroi d’avantages sociaux (art. L. 2123-8 du CGCT).
L’exercice du télétravail
Au regard des contraintes liées à l’exercice de mandats locaux, le CGCT impose à l’employeur de considérer les élus locaux comme faisant partie des salariés prioritaires au regard du droit de recours au télétravail, sous réserve que leur poste de travail y soit adapté (art. L. 2123-1-1, L. 3123-1-1 et L. 4135-1-1 du CGCT).
Attention : Il ne s’agit pas d’un droit au télétravail, ni d’un régime d’exception au regard des règles qui régissent le télétravail, mais de la garantie que les élus disposent de l’accès le plus favorable au télétravail.
L’entretien individuel de début de mandat
Au début de leur mandat, tous les salariés membres d’un organe délibérant d’une collectivité bénéficient, à leur demande, d’un entretien individuel avec leur employeur (art. L. 2123-1, 3123-1 et L. 4135-1 du CGCT). Cet entretien se distingue et ne se substitue pas à l’entretien professionnel mentionné à l'article L. 6315-1 du code du travail.
Cet entretien a pour objectif de définir les modalités concrètes d’articulation entre le mandat et l’activité professionnelle, notamment au regard des temps d’absence (voir ci-après). L’employeur et le salarié peuvent également, à cette occasion, s'accorder sur les mesures à mettre en œuvre pour faciliter la conciliation entre la vie professionnelle et les fonctions électives du salarié et, le cas échéant, sur les conditions de rémunération des temps d'absence consacrés à l'exercice de ces fonctions.
Les temps d’absence
Les élus locaux bénéficient de deux types de temps d'absence pour pouvoir concilier l'exercice de leur mandat avec une activité professionnelle et disposer du temps nécessaire à leur fonction élective.
Attention : ces droits sont également applicables aux élus ayant la qualité d’agent public.
Les autorisations d’absence
Les élus locaux ont droit à des autorisations d’absence leur permettant de se rendre et participer à des séances et réunions expressément énumérées (art. L. 2123-1, L. 3123-1 et L. 4135-1 du CGCT) :
- les séances plénières de l’organe délibérant ;
- les réunions des commissions dont ils sont membres et qui ont été instituées par délibération de l’organe délibérant ;
- les réunions des assemblées délibérantes et des bureaux des organismes où ils ont été désignés pour représenter leur collectivité ;
- les réunions des assemblées, des bureaux et des commissions spécialisées des organismes nationaux où ils ont été désignés ou élus pour représenter des collectivités territoriales ou des établissements publics en relevant.
L’élu doit informer son employeur par écrit, dès qu’il a connaissance de la date et de la durée de l’absence envisagée.
Les crédits d’heures
Indépendamment des autorisations d’absence, les élus locaux bénéficient d’un crédit d’heures afin de disposer du temps nécessaire à l’administration de la collectivité ou de l’organisme auprès duquel ils la représentent et à la préparation des réunions des instances où ils siègent (art. L. 2123-2, L. 3123-2 et L. 4135-2 du CGCT).
Contrairement aux autorisations d'absence, qui sont octroyées pour participer à des réunions identifiées, le volume de crédits d'heure est forfaitaire et trimestriel. Il est fixé par référence à la durée hebdomadaire légale du travail et varie selon les fonctions de l’élu et la population de la commune.
Les élus peuvent mobiliser ces heures sans avoir à justifier de leur utilisation. Pour en bénéficier, ils doivent informer leur employeur par écrit, trois jours au moins avant leur absence. L’employeur ne peut pas s’opposer à l’utilisation du crédit d’heures. Les heures non utilisées dans un trimestre ne peuvent être reportées dans le trimestre suivant. En cas de travail à temps partiel, le crédit d’heures est réduit proportionnellement à la réduction du temps de travail prévue pour l’emploi considéré.
Attention : des règles particulières sont applicables aux élus appartenant à des corps ou cadres d’emplois d’enseignants et aux élus militaires en position d’activité.
Majoration des crédits d’heures
Dans certaines communes, les conseils municipaux peuvent majorer la durée du crédit d’heures (art. L. 2123-4 du CGCT). Il s’agit des communes chefs-lieux de département, de canton, d’arrondissement, des communes sinistrées, des communes classées “ stations de tourisme ” au sens du code du tourisme, des communes dont la population a augmenté depuis le dernier recensement en raison de la mise en œuvre de travaux publics d’intérêt national (électrification, par exemple) et de celles qui, au cours d’au moins l’un des trois exercices précédents, ont été attributaires de la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale. Cette majoration est au maximum de 30 % par élu et par an.
Le barème du crédit d'heures trimestriel selon les fonctions exercées et la taille de la collectivité
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Taille de la commune (nombre d’habitants) |
Maire |
Adjoint |
Adjoint ou Conseiller municipal suppléant le maire |
Conseiller municipal sans délégation de fonction |
Conseiller municipal avec délégation de fonction |
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Moins de 10 000 hab. |
122 h3 0 |
70h |
Même crédit d’heures que pour le maire dont l’élu assure la suppléance |
10h30 |
Même crédit d’heures que pour l’adjoint de la même commune |
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De 10 000 à 29 999 hab. |
140 h |
122 h 30 |
21h |
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De 30 000 à 99 999 hab. |
140 h |
140 h |
35h |
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Plus de 100 000 hab. |
140 h |
140 h |
70h |
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Département et région |
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Président et vice-présidents |
140 h |
Membre |
105 h |
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Le temps total d’absence
Le temps total d’absence utilisé au titre des autorisations d’absence et des crédits d’heures ne peut dépasser la moitié de la durée légale du travail pour une année civile (en décomptant cinq semaines de congés payés ainsi que les jours fériés).
Pour les salariés, cette notion s’apprécie sur la base de 35 heures par semaine civile, en décomptant 5 semaines de congés payés et les jours fériés. Pour les fonctionnaires, les agents contractuels de l'État, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics administratifs, la durée légale annuelle du travail pour une année civile est de 1 607 heures.
L’assimilation des temps d’absence à une durée de travail effective
Les temps d’absence du travail, qui résultent de l’usage par les élus locaux de leur droit à autorisations d’absence et au crédit d’heures, sont assimilés à une durée de travail effective :
- pour la détermination de la durée des congés payés ainsi qu’au regard de tous les droits découlant de l’ancienneté (art. L. 2123-7, L. 3123-5 et L. 4135-5 du CGCT) ;
- pour la détermination du droit aux prestations sociales (art. L. 2123-25, L. 3123-20 et L. 4135-20 du CGCT).
Compensation des pertes de revenus liées à l’utilisation des temps d’absence
Les pertes de salaire résultant de l’utilisation des autorisations d’absence peuvent être compensées par l’employeur, qui peut décider de rémunérer ces absences comme du temps de travail effectif et maintenir le salaire de son employé. En revanche, il ne peut le faire pour les crédits d’heures.
Le CGCT prévoit également un dispositif spécifique pour les conseillers municipaux qui ne bénéficient d’aucune indemnité de fonction, exercent une activité professionnelle salariée ou non salariée et subissent des pertes de revenus liées à l’utilisation des temps d’absence précités (art. L. 2123-3). Leur commune ou l’organisme auprès duquel l’élu la représente peut décider de compenser les pertes de revenu subies.
Cette compensation est limitée à soixante-douze heures par élu et par an ; chaque heure ne peut être rémunérée à un montant supérieur à une fois et demie la valeur horaire du salaire minimum de croissance, soit un montant de 17,28 € brut par heure (13,7 € net) depuis le 1er janvier 2025, ce qui fait un montant maximal par an de 1 244,16 €.
Attention : cette compensation est de même nature que l’indemnité de fonction et est donc soumise à la CSG et à la CRDS.
Les garanties accordées aux élus locaux à l’issue de leur mandat
Garanties pour les élus ayant suspendu leur contrat de travail
Le droit à la réintégration dans l’entreprise
A l'expiration de leur mandat, les salariés qui ont suspendu leur contrat de travail (voir ci-dessus) retrouvent leur précédent emploi, ou un emploi analogue assorti d'une rémunération équivalente, dans les deux mois suivant la date à laquelle ils ont avisé leur employeur de leur intention de reprendre cet emploi. Ils bénéficient de tous les avantages acquis par les salariés de leur catégorie durant l'exercice de leur mandat, ainsi que d’une réadaptation professionnelle en cas de changement de techniques ou de méthodes de travail.
A noter : ce droit à réintégration est maintenu jusqu’à l’expiration de deux mandats consécutifs.
Le droit à un stage de remise à niveau
Les salariés qui ont suspendu leur contrat de travail bénéficient, à leur demande, d’un stage de remise à niveau organisé dans l’entreprise, compte tenu notamment de l’évolution de leur poste de travail ou de celle des techniques utilisées (art. L. 2123-11, L. 3123-9 et L. 4135-9 du CGCT).
Garanties pour les élus ayant cessé leur activité professionnelle
Le droit à une formation professionnelle et à un bilan de compétences
À l’issue de leur mandat, les maires, les adjoints au maire, les présidents et les vice-présidents ayant reçu délégation de conseils régionaux et départementaux qui, pour l'exercice de leur mandat, ont cessé leur activité professionnelle salariée, ont droit, sur leur demande, au bénéfice d’une formation professionnelle et à un bilan de compétences dans les conditions fixées par le code du travail. Lorsque les intéressés demandent en outre à bénéficier du congé de formation ou d’un congé de bilan de compétences, le temps passé au titre du mandat local est assimilé aux durées d’activité exigées pour l’accès à ces congés (art. L. 2123-11-1, L. 3123-9-1 et L. 4135-9-1 du CGCT).
Le droit à une allocation différentielle de fin de mandat
Les maires des communes d’au moins 1 000 habitants, les adjoints au maire des communes d’au moins 10 000 habitants, les présidents et les vice-présidents ayant reçu délégation de conseils régionaux et départementaux qui ont suspendu leur activité professionnelle pour se consacrer à leur mandat, peuvent bénéficier sur leur demande d’une allocation différentielle de fin de mandat (art. L. 2123-11-2, L. 3123-9-2 et L. 4135-9-2 du CGCT).
Leur mandat doit avoir pris fin lors du renouvellement général de leur organe délibérant. Ils doivent soit être inscrits à France Travail, soit avoir repris une activité professionnelle leur procurant des revenus inférieurs aux indemnités de fonction qu’ils percevaient au titre de leur fonction élective.
L’allocation différentielle de fin de mandat est servie pendant douze mois au maximum. Elle est au plus égale à 80 % de la différence entre le montant de l’indemnité brute mensuelle dont bénéficiait l’élu et l’ensemble de ses ressources perçues à l’issue du mandat durant les six premiers mois, et à 40% durant les six mois suivants.
L’allocation est versée par le fonds d’allocation des élus en fin de mandat (FAEFM) qui est géré par la Caisse des dépôts et consignations et alimenté par une cotisation annuelle des collectivités territoriales.
Dispositifs de reconversion
L’engagement dans une démarche de valorisation des acquis de l’expérience (VAE)
Les personnes ayant occupé un mandat électoral local peuvent engager une démarche de validation des acquis de l’expérience professionnelle (VAE) pour l’obtention d’un diplôme ou d’un titre à finalité professionnelle ou pour l’obtention d’un titre ou d’un diplôme délivré au nom de l’État par un établissement d’enseignement supérieur. Ils peuvent, dans ce cadre, valoriser l’ensemble des expériences acquises dans tous les mandats et fonctions électives locales (art. L. 6111-1 du code du travail).
Accès aux concours de la fonction publique
L’exercice d’un mandat local donne droit à l’accès au troisième concours pour certains corps ou cadres d’emploi de la fonction publique (art. L. 325-7 du code général de la fonction publique).