Un autre dispositif de différenciation : les propositions d’adaptation ou de modification des normes
La différenciation est un principe qui a été consacré par la loi « 3DS » du 21 février 2022 et inscrit à l’article L. 1111-3-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT).
En matière de différenciation, certaines collectivités territoriales peuvent formuler des propositions, qui prennent la forme de propositions de modifications ou d’adaptations des normes.
Qui peut proposer une adaptation/modification des normes ?
Les départements et les régions de droit commun et d’outre-mer, les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique et la collectivité de Corse.
Dans quels domaines ?
Ces propositions peuvent porter sur des dispositions législatives ou règlementaires portant tant sur des règles d’attribution que sur des règles d’exercice des compétences des collectivités territoriales concernées.
Les périmètres diffèrent ensuite selon les collectivités territoriales, dans les conditions fixées par les dispositions du code général des collectivités territoriales (CGCT) qui les régissent.
Quels critères à respecter ?
L’adaptation ou la modification envisagée doit respecter le principe constitutionnel d’égalité, qui « [...] n'interdit pas l'application de règles différentes à des situations non identiques » (Conseil constitutionnel n° 84-174 DC du 25 juillet 1984).
En effet, ce principe applicable aux collectivités territoriales « ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l'objet de la loi qui l'établit » (Conseil constitutionnel n° 91-291 DC du 6 mai 1991 sur la loi instituant une dotation de solidarité urbaine et un fonds de solidarité des communes de la région d'Ile-de-France ; voir aussi : Conseil constitutionnel n° 79-107 DC du 12 juillet 1979 ; Conseil constitutionnel n° 87-232 DC du 7 janvier 1988).
Ainsi, l’article L. 1111-3-1 du CGCT indique que les règles relatives à l'attribution et à l'exercice des compétences applicables à une catégorie de collectivités territoriales peuvent être différenciées pour tenir compte des différences objectives de situations dans lesquelles se trouvent les collectivités territoriales relevant de la même catégorie.
A titre d’exemple, le Conseil d’État précise dans son avis n° 393651 du 7 décembre 2017 sur la différenciation des compétences des collectivités territoriales relevant d’une même catégorie et des règles relatives à l’exercice de ces compétences que « Les critères de distinction peuvent être démographiques ou tirés du type d’urbanisation de la commune » et que « Des critères démographiques, ou sociaux peuvent se combiner avec un critère géographique pour imposer, dans l’exercice de leurs compétences, des obligations particulières à certaines communes et non à d’autres. »
De plus, l’article L. 1111-3-1 du CGCT exige que la différence de traitement envisagée soit proportionnée et en rapport avec l'objet de la loi qui l'établit. Il s’agit d’un contrôle de l’atteinte portée à un droit fondamental, atteinte qui ne doit pas revêtir un caractère disproportionné. Il s’agit également de s’assurer de l’adéquation de la dérogation juridique ainsi créée à la satisfaction du besoin exprimé par la collectivité territoriale.
Le dépôt et l’instruction des propositions
Le président du conseil ou de l’assemblée transmet la proposition adoptée par l’organe délibérant au Premier ministre via l’adresse mél propositions.collectivites@pm.gouv.fr, au représentant de l’Etat dans le territoire et, si elle porte sur des dispositions législatives, aux présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat.
Le Premier ministre accuse réception de la proposition transmise et désigne le(s) ministère(s) chargé(s) d’apporter les éléments utiles permettant d’estimer les suites à donner.
Si les suites données sont favorables, un projet de loi ou de règlement, selon le niveau de norme concerné, doit prévoir la modification ou l’adaptation.
Les textes de référence
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Article L. 1111-3-1 du code général des collectivités territoriales ;
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Pour les départements : article L. 3211-3 du code général des collectivités territoriales ;
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Pour les régions : article L. 4221-1 du code général des collectivités territoriales ;
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Pour les départements d’outre-mer : articles L. 3444-2 du code général des collectivités territoriales ;
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Pour les régions d’outre-mer : article L. 4433-3 du code général des collectivités territoriales ;
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Pour la collectivité territoriale de Guyane : article L. 7152-1 du code général des collectivités territoriales ;
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Pour la collectivité territoriale de Martinique : article L. 7252-1 du code général des collectivités territoriales ;
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Pour la collectivité de Corse : article L. 4422-16 du code général des collectivités territoriales ;