Collectivités d'outre-mer

Statut particulier : Nouvelle-Calédonie

Les accords Matignon interviennent le 26 juin 1988  pour  créer trois provinces semi-autonomes et prévoir un référendum d’autodétermination pour 1998. Le référendum a été depuis repoussé à 2014. En l’attente, les accords de Nouméa du 5 mai 1998 engagent la transformation du statut de la Nouvelle-Calédonie.

Le statut de la Nouvelle-Calédonie

Les Accords de Nouméa se traduisent par la révision constitutionnelle du 20 juillet 1998. Le statut de la Nouvelle Calédonie fait désormais l’objet du titre XIII de la Constitution. Les modalités de transfert de compétences de l’État aux institutions de Nouvelle Calédonie, les règles d’organisation et de fonctionnement de ces institutions ainsi que celles relatives à la citoyenneté, au régime électoral, à l’emploi et au statut civil coutumier sont renvoyées à une loi organique. La loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 reconnaît la spécificité de ce territoire d’outre mer et met en place des mécanismes spécifiques pour les populations insulaires.

Tout d’abord, le partage de la Nouvelle-Calédonie en trois provinces semi-autonomes introduit en 1988 est consacré. Chacune des ces provinces possède une assemblée délibérante qui lui est propre. Elles disposent également de représentants au Congrès de la Nouvelle Calédonie. Les membres de ces deux instances sont élus lors de la même élection au suffrage restreint et dans le cadre de la province. Le nombre de représentants d’une province au Congrès est proportionnel à son poids démographique. La province du Sud se voit donc attribuer près des 3/5èmes des 54 sièges du Congrès. Enfin, la Nouvelle-Calédonie dispose d’un gouvernement. Ce dernier est élu par le Congrès et reste en place jusqu’à expiration du mandat du Congrès qui l’a élu. Le Président du gouvernement est le représentant de la Nouvelle-Calédonie. Il dirige l’administration et nomme aux emplois publics.

Ces mesures constitutionnelles et législatives soulèvent la question du statut juridique de la Nouvelle Calédonie. Depuis la révision constitutionnelle du 20 juillet 1998, son statut fait l’objet d’un titre constitutionnel à part entière, le titre XIII. Ceci a deux conséquences. Premièrement, le statut des territoires d’outre mer, jusqu’alors défini par l’article 74 de la Constitution, n’est plus unique. Deuxièmement, la Nouvelle-Calédonie échappe au statut général des collectivités locales défini par le titre XII de la Constitution. Toutefois, la révision constitutionnelle de 2003 l’intègre à la liste des collectivités d’outre mer (article 72-3). En fait , la Nouvelle-Calédonie est une collectivité « sui generis ». Dans ce cadre, on emploie l’expression « collectivité d’outre mer à statut particulier » pour la désigner.

L’organisation des compétences

En dehors de ses spécificités juridiques, la Nouvelle-Calédonie dispose également de dérogations à certains grands principes et de transfert de compétences.

Elle bénéficie notamment d’une certaine autonomie politique. En effet, l’article 188 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 consacre une conception restrictive du vote en Nouvelle Calédonie. Pour avoir le droit de voter pour les élections des Assemblées provinciales et du Congrès, il faut résider depuis au moins dix ans en Nouvelle Calédonie. Ceci implique l’émergence d’une citoyenneté locale qui a été autorisée par l’article 77 de la Constitution.

La Nouvelle Calédonie peut également voter des « lois du pays ». En effet, les Accords de Nouméa annoncent clairement le partage de la souveraineté entre la France et la Nouvelle- Calédonie. Ce principe est consacré par l’article 77 de la Constitution depuis le 20 juillet 1998. Ces « lois du pays » sont en fait des actes administratifs mais leurs contrôle échappe au juge administratif et échoit au Conseil Constitutionnel. Ce qui en fait des actes quasi législatifs. La loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 précise les domaines sur lesquelles peuvent porter les « lois du pays », on y retrouve des attributions législatives classiques définies par l’article 34 de la Constitution. Apriori, le principe de souveraineté partagée heurte celui de son indivisibilité. Toutefois, le Conseil Constitutionnel admet ici comme dans le cas de la citoyenneté partagée qu’il est possible de déroger à certains principes constitutionnels sous réserve de le justifier par des fondements constitutionnels. 

Enfin, la France procède à des transferts de compétences vers la Nouvelle-Calédonie ou ses provinces. L’article 21 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 établit ainsi la liste des missions de l'État pour lesquelles il est compétent, celles pour lesquels il est associé et celles qui relèvent d’un transfert progressif. La première catégorie recouvre principalement les fonctions régaliennes classiques. La seconde catégorie concerne largement les relations extérieures. Depuis le 1er janvier 2000, les transferts ont concerné quatre domaines : le droit du travail, le commerce extérieur, la réglementation des hydrocarbures, du chrome et du nickel et l’enseignement primaire public.

La Nouvelle-Calédonie est donc un modèle unique. Elle bénéficie d’un début d’autonomie politique et le transfert de compétences à son bénéfice devient significatif.

Statut particulier : la Polynésie française

Les fondements du statut de la Polynésie

La Constitution du 27 octobre 1946 fait de la Polynésie un territoire d’Outre-Mer (TOM). Ce statut est maintenu par la Constitution de 1958. La révision constitutionnelle du 28 mars 2003 modifie l’article 74 de la Constitution relatif aux TOM. Désormais, le terme TOM est remplacé par celui de collectivité d’Outre-Mer (COM) et donne à la loi la mission de définir « les règles d’organisation et de fonctionnement des institutions de la collectivité et le régime électoral de son assemblée délibérante. Ce statut est adopté après consultation de l’Assemblée délibérante de la COM concernée ».

Le statut particulier de la Polynésie est donc fixé par la loi n° 2004-192 du 27 février 2004. Elle définit une organisation différente de celle du droit commun et proche d’un parlementarisme d’assemblée. Ainsi le « président de la Polynésie » est créé. Il a une fonction de représentant, il dirige l’action du gouvernement et de l’administration et promulgue les « lois du pays ». Le gouvernement de Polynésie, constitué de 7 à 10 ministres, est chargé de conduire la politique de la collectivité. L’organe délibérant est l’Assemblée de Polynésie élue au suffrage universel direct tous les cinq ans.

L’autonomie administrative de la Polynésie

Malgré une organisation institutionnelle originale, la Polynésie ne bénéficie pas d’une autonomie politique mais d’une autonomie administrative.

Ainsi, un droit spécifique y est appliqué. D’une part sur le fondement du principe de spécialité législative et réglementaire. Selon ce principe il appartient au législateur organique de chaque COM de définir les conditions d’application des lois et règlements applicables. Le droit métropolitain n’est donc applicable que sur mention expresse en ce sens. D’autre part, la Polynésie dispose de « certaines catégories d’acte de l’assemblée délibérante intervenant au titre des compétences qu’elle exerce dans le domaine de la loi » communément appelées « lois du pays ». Ces actes interviennent dans des domaines très larges de la compétence de principe de la Polynésie et ne peuvent être contestés que devant le Conseil d’État et non le Tribunal administratif.

Cette autonomie administrative se traduit dans la répartition des compétences entre l’État et la Polynésie. L’État dispose des compétences dans les domaines de « souveraineté visés par l’article 14 de la loi organique de 2004 » ainsi que de trente sept autres secteurs comme « la coopération intercommunale », « la police et la sécurité concernant l’aviation civile », etc que le législateur de la COM a choisi d’attribuer à l’État. De son côté, en plus de la compétence de droit commun, la Polynésie « peut participer, sous le  contrôle de l’État à l’exercice des compétences qu’il conserve dans le respect des garanties accordées sur l’ensemble du territoire national pour l’exercice des libertés publiques » (article 74 alinéa 11 de la loi n° 2004-192 du 27 février 2004). 

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